Chaque semaine, La Minute Cerveau & Recherche vous propose un tour d’horizon des avancées scientifiques sur la maladie d’Alzheimer et les maladies neurocognitives.
Au programme cette semaine : un zoom sur la communication neuronale, le rôle de l’environnement cellulaire dans le vieillissement, une innovation technologique en diagnostic, et une mise à jour réglementaire cruciale pour un traitement très attendu.
/ Les actualités de l’épisode 11 – du 29 septembre au 5 octobre 2025
1. Alzheimer : Quand le lien entre les neurones et leur environnement se dérègle
Pour mieux comprendre les origines de la maladie d’Alzheimer, les scientifiques s’appuient aujourd’hui sur des approches biologiques et moléculaires complexes combinant l’analyse de milliers de données issues du cerveau humain à différents stades de la maladie. Une nouvelle étude de grande ampleur s’est fondée sur l’analyse approfondie de l’ensemble des protéines et des gènes s’exprimant dans les régions les plus vulnérables de notre cerveau, à la recherche des réseaux moléculaires impliqués dans le dysfonctionnement du cerveau.
Les résultats mettent en lumière un dérèglement des communications entre les neurones et les cellules gliales essentielles à la survie des neurones, en particulier au niveau des synapses – ces zones de contact entre neurones, essentielles à la transmission de l’information. Les cellules gliales issues de notre système immunitaire sont normalement chargée de protéger et soutenir les neurones.
Les chercheurs ont identifié en particulier une protéine, AHNAK, fortement présente chez les personnes atteintes d’Alzheimer. En réduisant son expression dans des modèles expérimentaux, ils ont observé des effets neuroprotecteurs : moins de lésions, moins de déficits cognitifs.
Cette découverte renforce l’idée que les interactions entre les neurones et les cellules immunitaires du cerveau jouent un rôle central dans la progression de la maladie.
2. Mieux comprendre le vieillissement cellulaire pour prévenir Alzheimer
Le vieillissement cellulaire est-il programmé dès le départ — ou influencé par l’environnement qui entoure la cellule ?
Pour répondre à ces questions clés, des chercheurs se sont penchés sur les microglies : elle est composée de cellules immunitaires présentes dans le cerveau et qui jouent un rôle central dans l’entretien du système nerveux. Elles aident à éliminer les déchets, protègent les neurones et assurent le bon fonctionnement des connexions entre les cellules (les synapses).
Avec l’âge, les cellules de la microglie deviennent moins efficaces. L’étude a cherché à savoir si cette altération vient uniquement du vieillissement « interne » des cellules… ou si elle est influencée par leur environnement. Et la réponse est surprenante.
Lorsque l’on place des cellules de la microglie dans un environnement « âgé », elles prennent rapidement un comportement de cellules vieilles. A l’inverse, lorsque des cellules de microglies âgées sont transférées dans un environnement « jeune », elles retrouvent certaines fonctions de jeunesse.
Cela s’explique par la présence de signaux moléculaires présents dans l’environnement cellulaire et suggère que le vieillissement n’est pas une fatalité inscrite dans chaque cellule, mais qu’il dépend aussi fortement de ce qui l’entoure. Cette découverte ouvre des pistes prometteuses pour mieux comprendre le vieillissement cérébral et imaginer des stratégies pour « rajeunir » les cellules impliquées dans Alzheimer.
3. La technologie infrarouge au service du diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer
Dans la maladie d’Alzheimer, l’accumulation de certaines protéines dans le cerveau — notamment les peptides amyloïdes — est l’un des premiers signes de la pathologie. Les dépôts peuvent être repérés à travers différents biomarqueurs, dans le cerveau, dans le liquide cérébrospinal ou même dans le sang.
Aujourd’hui, plusieurs techniques permettent déjà de détecter ces peptides grâce à des anticorps spécifiques. Mais leur précision reste perfectible, notamment dans les stades précoces de la maladie.
Des chercheurs allemands ont mis au point une nouvelle méthode de détection qui combine ces anticorps à une technologie infrarouge. Concrètement, après avoir fixé les peptides amyloïdes avec les anticorps, un détecteur infrarouge vient mesurer avec finesse la quantité présente, en analysant les longueurs d’ondes spécifiques renvoyées par la lumière.
Cette technique, plus sensible et spécifique que les outils actuels, pourrait permettre de détecter les signes très précoces de la maladie directement dans le sang – de manière plus simple et moins invasive que l’imagerie ou la ponction lombaire.
Une avancée technologique prometteuse dans la course à un diagnostic toujours plus précoce et accessible.
4. Donanemab, accord de mise sur le marché par la Commission Européenne
Dans le domaine des traitements contre la maladie d’Alzheimer, deux médicaments font beaucoup parler d’eux ces derniers mois : le lécanémab (Leqembi) et le donanémab (Kisunla), deux anticorps conçus pour éliminer les plaques amyloïdes dans le cerveau.
Mais entre annonces d’autorisation, refus ou évaluations en cours, difficile de s’y retrouver ?
Le processus de décision de mise sur le marché des médicaments est un processus complexe qui implique plusieurs instances de réglementation allant des instances européennes aux instances nationales.
Pour être mis sur le marché, un médicament suit un processus de validation en plusieurs étapes :
- Il doit d’abord être approuvé par l’Agence européenne du médicament (EMA), après évaluation des données scientifiques,
- Puis obtenir un accord officiel de la Commission européenne,
- Et enfin être évalué au niveau des agences nationales (en France, par la Haute Autorité de Santé) pour décider des conditions d’accès et de remboursement dans un pays donné.
L’autorisation de mise sur le marché européen (AMM) du donanémab est une étape réglementaire clé, mais elle ne garantit pas encore un accès direct pour les malades en France.
La prochaine étape repose sur l’évaluation de la Haute Autorité de Santé (HAS), qui devra juger :
- de l’efficacité clinique du traitement,
- de ses risques potentiels (effets indésirables, complications),
- de la balance entre le bénéfice et le risque pour les patients et son intérêt par rapport aux traitements actuels,
- et enfin de son impact médico-économique.
Ce processus d’évaluation peut aboutir à un remboursement, à un accès encadré ou à un refus.
Autrement dit, le donanémab est désormais autorisé au niveau européen, mais son arrivée effective dans les parcours de soins français dépend encore des décisions nationales à venir.
/ En bref – Ce qu’il faut retenir
- Neurones & cellules gliales : un réseau de protéines suspecté de perturber les échanges cérébraux chez les patients Alzheimer.
- Vieillissement : certaines cellules de notre cerveau peuvent vieillir ou rajeunir selon l’état de leur environnement
- Traitement : le donanémab obtient une autorisation européenne, mais l’accès en France dépend encore d’évaluations à venir.
- Diagnostic : une nouvelle méthode de détection par infrarouge pour repérer les peptides amyloïdes dans le sang.
/ Rendez-vous dimanche prochain !
Les recherches progressent à tous les niveaux : comprendre les mécanismes en jeu dans le cerveau, détecter la maladie plus tôt, et proposer des outils thérapeutiques efficaces.
Mais chaque découverte, chaque innovation ou autorisation pose aussi la question de l’accès réel aux patients, en France et ailleurs.
C’est pourquoi la Fondation Alzheimer continue de soutenir une approche globale : financement de la recherche, veille scientifique, sensibilisation du public… pour donner un futur à notre mémoire.