Minute Cerveau & Recherche – Episode 12

Publié le

Notre cerveau évolue tout au long de la vie. Il change de forme, d’activité, et réagit à notre environnement — qu’il s’agisse de notre mode de vie, de notre état de santé ou même de nos gènes. Cette semaine, les chercheurs nous éclairent sur de nouvelles facettes de la maladie d’Alzheimer : du rôle de l’obésité à celui des vaisseaux sanguins, en passant par la localisation de la protéine tau dans le cerveau. Cinq études pour mieux comprendre, diagnostiquer et anticiper cette maladie complexe.

/ Les actualités de l’épisode 6 au 12 octobre 2025

Notre cerveau est un organe capable d’une grande plasticité :il évolue tout au long de la vie, en fonction de nombreux facteurs comme les stimulations sensorielles, l’apprentissage, les traumatismes … mais aussi avec le vieillissement. Ces évolutions peuvent concerner à la fois le fonctionnement du cerveau – par exemple via l’activation de nouveaux réseaux de neurones – et sa structure anatomique, notamment la taille ou l’épaisseur de certaines régions.

Dans les maladies neurocognitives comme Alzheimer, ces changements anatomiques sont bien connus. Mais une nouvelle étude menée sur des données d’IRM de plus de 1 000 personnes âgées de 30 à 97 ans montre qu’avec l’âge, la forme même du cerveau évolue. Certaines zones peuvent s’étendre, d’autres se comprimer à l’intérieur de notre boîte crânienne.

Les chercheurs ont observé que ces modifications anatomiques sont associées à des baisses de performances cognitives, en particulier en lien avec :

  • la mémoire épisodique (la souvenir des évènements vécus)
  • et les fonctions exécutives (comme la planification, la concentration ou la résolution de problèmes)

Cette découverte souligne l’importance des changements physiques du cerveau dans le développement des troubles cognitifs liés à l’âge – et pourrait ouvrir la voie à de nouveaux outils de détection précoce.

Les lipides – ou graisses – sont essentiels au bon fonctionnement de notre corps. Ils servent de réserve d’énergie, entrent dans la composition des membranes de nos cellules, et jouent un rôle central dans le cerveau. Mais que se passe-t-il lorsque ces lipides s’accumulent en excès, comme c’est le cas en situation d’obésité ?

Des études ont déjà montré un lien entre l’obésité et un risque accru de développer une maladie d’Alzheimer. Une nouvelle étude américaine propose une explication biologique à ce lien. Les chercheurs se sont penchés sur des vésicules extracellulaires, sortes de petites particules libérées par les cellules du tissu adipeux (la graisse corporelle) qui transportent des lipides dans notre organisme.

Chez les personnes obèses, ces vésicules présentent un profil lipidique altéré : leur composition en graisses est différente de celle observée chez des individus non obèses.

Et surtout, lorsqu’elles sont introduites dans des modèles expérimentaux, ces vésicules favorisent l’accumulation du peptide amyloïde, l’un des marqueurs caractéristiques de la maladie d’Alzheimer.

Cette étude renforce l’idée d’une communication directe entre tissu adipeux et cerveau, notamment via ces vésicules extracellulaires. Mieux comprendre ces mécanismes pourrait ouvrir la voie à de nouvelles stratégies de prévention, en agissant plus tôt sur les facteurs métaboliques liés à l’obésité.

Diagnostiquer la maladie d’Alzheimer – et plus largement les maladies neurocognitives – n’est jamais simple. Plusieurs causes peuvent se chevaucher et rendre le tableau clinique plus complexe : lésions cérébrales, troubles métaboliques, vieillissement… mais aussi atteintes des vaisseaux sanguins du cerveau, souvent négligées.

Dans une étude récente, des chercheurs américains ont voulu mieux comprendre le rôle des maladies cérébrovasculaires, en étudiant les tissus cérébraux de patients. Leur objectif : affiner la classification de ces pathologies pour mieux les diagnostiquer et mieux les distinguer d’autres maladies neurocognitives.

Deux éléments ressortent de leurs observations :

  • D’abord, la présence d’atteintes spécifiques aux micro-vaisseaux (les plus petits vaisseaux sanguins du cerveau), qui peuvent passer inaperçues, mais avoir un impact important sur le fonctionnement cérébral.
  • Ensuite, la découverte surprenante de microplastiques dans ces tissus, associés à une inflammation cérébrale. Ces substances pourraient aggraver ou déclencher des processus neurotoxiques, notamment via des réactions immunitaires.

Pour les auteurs, il est urgent de mieux prendre en compte la diversité des atteintes vasculaires – à la fois dans leur nature et dans leur localisation – pour améliorer le diagnostic différentiel des maladies neurocognitives, dont la maladie d’Alzheimer. Par ailleurs, la lutte contre la pollution permettrait de réduire une partie de ces atteintes vasculaires.

La maladie d’Alzheimer est souvent associée à l’accumulation des protéines amyloïde et tau dans le cerveau. Mais ces protéines sont-elles les seules responsables des troubles cognitifs ? Et quel rôle jouent les vaisseaux sanguins dans cette histoire ?

Pour répondre à ces questions, des chercheurs ont analysé les cerveaux de 579 personnes décédées, toutes présentant des niveaux très élevés de protéine tau – caractéristiques des stades avancés de la maladie.

Leur découverte : un grand nombre d’atteintes vasculaires, notamment des micro-infarctus cérébraux – de toutes petites zones de tissu cérébral privées d’oxygène. Bien qu’ils soient difficiles à détecter de leur vivant, ces micro-infarctus semblent très fortement liés à l’apparition des troubles cognitifs, en particulier chez les personnes âgées.

Pourquoi ? Parce qu’ils touchent des régions clés du cerveau, où ils altèrent la substance blanche (les connexions entre les neurones) et les circuits essentiels à la mémoire ou à l’attention.

💡 Ce que montre cette étude : les troubles cognitifs ne sont pas seulement causés par les protéines toxiques, mais aussi par des dommages vasculaires invisibles, souvent négligés. Cela plaide pour un diagnostic plus global de la maladie d’Alzheimer, qui prenne en compte la santé des vaisseaux cérébraux.

La maladie d’Alzheimer est caractérisée, entre autres, par l’accumulation anormale de la protéine tau dans certaines régions du cerveau. Grâce à l’imagerie par émission de positon (TEP), il est désormais possible de détecter cette accumulation très précocement, bien avant l’apparition de symptômes sévères.

Mais une question reste posée : la localisation de la protéine tau dans le cerveau peut-elle prédire le type de troubles cognitifs à venir ?

Pour y répondre, des chercheurs ont suivi 731 personnes souffrant de troubles cognitifs légers et présentant des dépôts amyloïdes. Tous ont passé des tests de mémoire, langage et fonctions exécutives pendant 24 mois, en parallèle d’analyses d’imagerie cérébrale.

Résultat : la localisation régionale de tau prédit très finement les symptômes cognitifs. Par exemple :

  • Si tau s’accumule dans les régions fronto-temporales gauches, des troubles du langage apparaissent.
  • Si tau se concentre dans les régions temporales antérieures gauches, c’est la mémoire sémantique (les connaissances générales) qui est altérée.

Cette étude souligne l’importance d’une prise en charge personnalisée, fondée sur les caractéristiques cérébrales de chaque patient. En cartographiant la présence de tau, les cliniciens pourraient anticiper les difficultés à venir — et adapter les interventions.

/ En bref – Ce qu’il faut retenir

  • Le cerveau change de forme avec l’âge, ce qui impacte nos capacités cognitives.
  • L’obésité pourrait favoriser Alzheimer via des lipides circulants modifiés.
  • Mieux comprendre les atteintes vasculaires du cerveau – y compris celles causées par la pollution – pourrait aider à diagnostiquer plus précisément la maladie d’Alzheimer
  • Les micro-infarctus sont associés à la sévérité des troubles cognitifs.
  • L’imagerie Tau permet de prédire quels symptômes cognitifs apparaîtront selon la région du cerveau touchée.

/ Rendez-vous dimanche prochain !

Les avancées de la recherche continuent de démontrer que la maladie d’Alzheimer est multifactorielle : métabolisme, circulation cérébrale, localisation des protéines… Autant de pistes qui soulignent l’importance d’une approche globale, préventive et personnalisée pour mieux anticiper et traiter les maladies neurocognitives.


Télécharger
Partager sur :

/ Vous aimerez aussi

Newsletter

Je souhaite recevoir toutes les dernières actualités